Deux hommes sur une route, deux hommes qui marchent: ils faisaient route vers Emmaüs… Ils tournaient le dos à Jérusalem, Jérusalem, le ville de la déroute et du malheur. Comme si la fuite pouvait être une issue, comme si le malheur ne finissait pas toujours par nous rattraper… Ils sont nos frères de panique et de chagrin.
Jésus marchait avec eux, mais leurs yeux infirmes étaient empêchés de la reconnaître. Nous croyons fuir, nous aveugler, mais Dieu ne nous laisse pas tomber; il s’attache à nos pas, comme le mère à ceux, maladroits et risqués, de son petit enfant. Jésus nous emboîte le pas, épouse, l’un après l’autre, chacun de nos faux pas, s’égare avec nous en tous nos pas perdus…
Il accepte ainsi de passer pour un autre, de passer pour un mort. C’est dur de s’entendre dire – de la bouche même de ses amis – qu’on n’existe plus, d’entendre dire n’importe quoi sur son compte… Jésus bannit toute impatience, toute violence, tout mépris: il leur laisse le temps de se rendre compte, de s’apercevoir; sa pédagogie est tout entière informée par l’amour.